Parole à Jacques Rancière

Jeudi 17 octobre 2019 à 19h30

Architectures déplacées

Un art est toujours aussi un nom de l’art, une manière de dire et de montrer ce que fait l’art et ce qui fait art. L’architecture, dit Kant, est l’art de la «vérité sensible», celui qui donne à l’idée une figure matérielle, en adaptant exactement ses moyens à ses fins. Mais ce pouvoir même la met aux limites de l’art, lequel vit d’apparence et de l’indistinction entre moyens et fins. D’où l’effort constant pour lui enlever de sa finalité et de sa solidité en la mettant au régime de l’apparence. Au XVIIIe siècle les réformateurs de l’art des jardins opposent aux parterres symétriques des architectes les libres scènes de la nature et peuplent leurs jardins de fabriques inutiles dont ils trouvent les modèles dans les architectures imaginaires des peintres. Autour de 1900, les réformateurs  du théâtre dessinent des « espaces rythmiques » pour libérer le drame musical de l’anecdote et des décors peints ou rêvent de pièces d’un genre nouveau où les « ambiances » d’un escalier remplaceraient les contorsions d’acteurs imitant des états d’âme. Au temps de la révolution soviétique, des architectes imaginent des villes flottantes semblables aux nuages des peintres. D’autres, aujourd’hui, continuent à se rêver poètes.  On étudiera les enjeux esthétiques et politiques de ces architectures déplacées.

 

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