Parole à Alain Supiot

Jeudi 2 décembre 2021

Le crédit de la parole

« On lie les bœufs par les cornes et les hommes par les paroles ». Ce vieil adage juridique s’applique à la Cité qui, à la différence de la Ville, ne désigne pas un regroupement de population sur un territoire donné, mais l’association de citoyens sous l’égide d’une loi commune. Cette citoyenneté peut s’exercer à des échelles variées — depuis la commune jusqu’au monde entier, mais repose toujours sur divers types d’ « assemblées de paroles », qui servent à accorder les citoyens sur une juste représentation de ce qui est et de ce qui doit être. Encore faut-il pour que ces paroles cimentent la Cité, qu’on puisse leur accorder crédit. Or de multiples symptômes témoignent de nos jours d’une perte de crédit de la parole, qu’elle soit politique, commerciale ou scientifique. Pour saisir les causes profondes d’un tel discrédit, et des violences qui en résultent, on partira des conditions institutionnelles qui permettent d’échanger des paroles plutôt que des coups. Sur cette base il devient possible d’esquisser les voies d’une restauration du crédit de la parole dans la Cité du XXIème siècle.

 

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